MELLAN : STATUES DU PALAIS DES TUILERIES (Téléchargement)

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Gravés au burin
publiés à Paris
en 1677

Description

Statues antiques du palais des Tuileries
Gravures au burin de Claude MELLAN (Abbeville 1598 – Paris 1688)
pour le recueil : « Statues antiques étant au palais des Tuileries »
de Sébastien MABRE-CRAMOISY (Paris 1637 – Paris 1687)
Directeur de l’imprimerie Royale à Paris
1677

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Description par André FÉLIBIEN :

STATUES ANTIQUES ÉTANT AU PALAIS DES TUILERIES

I. STATUE DE DIANE
Quelques-uns ont cru que cette statue de Diane avait été autrefois dans le temple d’Ephèse, & qu’elle y avait même rendu des oracles. Elle fut apportée à Paris sous le règne du roi Henry IV qui, pour marque de l’estime qu’il faisait de cette rare figure, fit bâtir exprès au bout de la grande galerie du Louvre la salle qu’on appelle la Salle des Antiques, qu’il fit paver & revêtir de toutes sortes de marbres avec des pieds d’estaux, & des niches pour y mettre encore d’autres figures qui devaient venir d’Italie. L’on ne voit aucune marque qui puisse faire connaître quel est le sculpteur qui l’a taillée. Ce que l’on peut dire, est qu’assurément cette figure est très antique, & d’une grande beauté. L’air de son visage est noble & gracieux : ses cheveux, ramassés & noués d’une bandelette, font une coiffure négligée, & découvrent un beau front, tel qu’Apulée décrit celui de cette déesse. Ses épaules un peu plus larges qu’elles ne sont d’ordinaire chez les femmes, sont aussi conformes à ce qu’en ont dit les poètes, de même que ses bras & ses jambes, dont ils louent la force & la vigueur à cause des exercices pénibles auxquels elle s’adonnait. Elle est représentée ici en habit de chasseresse, avec un carquois sur ses épaules, & un vêtement court & léger qui n’empêche point qu’on ne voit toutes les proportions d’un beau corps.

II. STATUE DE BACCHUS
Cette figure de Bacchus a été longtemps dans la salle des Antiques avec la Diane décrite plus haut. Elle est travaillée avec beaucoup de science, & représente Bacchus tel qu’il a toujours été dépeint par les Anciens, c’est-à-dire avec des cheveux longs & négligés, & toutes les autres parties de son corps parfaitement belles. Il est couronné de pampre : une peau de tigre lui passe en écharpe de l’épaule gauche par dessous le bras droit qui est élevé sur sa tête, & qui par cette attitude laisse voir au dessous de l’aisselle une grande partie de son corps, où les muscles sont marqués avec beaucoup de science & de tendresse. Son bras gauche est appuyé sur un tronc d’arbre environné d’un cep de vigne.

III. STATUE DE VÉNUS
De toutes les divinités que les Anciens adoraient, il n’y en a point dont on ait fait autant d’images que Vénus. Ce grand nombre de statues est cause que plusieurs ont échappé à l’injure des temps. Il est vrai que l’on ignore le nom des ouvriers qui les ont faites, & qu’elles n’ont pas eu toutes les mêmes avantages que celle qui est à Rome dans la Vigne de Médicis, que l’Hercule de Farnèse, & que le Laocoon, toutes aussi fameuses par les noms des sculpteurs que l’on y voit graver que par leur beauté : mais comme il y en a quantité de très belles, qui ne laissent pas d’être considérables, bien qu’on n’en connaisse pas les auteurs, parce qu’elles portent avec elles leur recommandation, l’on doit considérer par son propre mérite celle qui est aux Tuileries.
Elle est accompagnée d’un dauphin que l’on mettait d’ordinaire auprès de Vénus lorsqu’on la représentait nue, & sortant de la mer, pour marque qu’elle avait été engendrée dans cet élément. Comme les plus excellents sculpteurs de l’Antiquité cherchaient avec beaucoup de soin à faire voir ce qu’il y a de plus parfait dans la construction du corps humain, c’était particulièrement sur la statue de Vénus qu’ils s’efforçaient d’exprimer, avec plus d’art & de science, les diverses beautés qui peuvent former le corps d’une femme parfaitement belle, comme l’on voit dans cette figure.

IV. STATUE D’UNE CHASSERESSE
Cette figure représente une jeune chasseresse vêtue à la légère de la manière que les poètes ont décrit les Nymphes, compagnes de Diane : ce que le sculpteur a été bien aise de suivre, afin de faire paraître beaucoup de nu. D’une main, elle tient un arc, & paraît en action de courir ce qui fait a croire à quelques-uns qu’on a voulu figurer Atalante qui s’exerce à la course, en quoi elle surpassait tous ceux de son temps. Mais l’arc que cette figure tient d’une main fait conjecturer que c’est plutôt une simple chasseresse qu’on a voulu représenter, que l’image de cette princesse : si ce n’est qu’on voulut dire que cette Atalante n’est pas la fille de Schœnée, roi de l’Île de Skyros, qu’Hippomène vainquit par le moyen des pommes d’or que Vénus lui avait données, mais une autre Atalante, fille de Jasius ou Jason, roi d’Arcadie, qui fuyant la compagnie des hommes, s’attacha auprès de Diane, pour s’adonner au seul plaisir de la chasse; en quoi elle excella si fort qu’elle eut l’avantage de frapper la première un sanglier formidable qui faisait un dégât horrible par tout le pays; à cause de quoi Méléagre, fils d’Ornée, roi de Callidon, donna à Atalante les dépouilles de cette bête. Or quelle qu’ait été l’intention que le sculpteur puisse avoir eu dans la représentation de cette figure, il en a fait une très belle image, où l’on reconnaît l’art & la science d’un des plus excellents ouvriers de toute la Grèce, principalement dans la disposition de cette figure, dont le corps est si bien mis en équilibre, que paraissant en action de courir, elle n’est soutenue que sur l’une de ses jambes, l’autre étant levée & en l’air.

V. STATUE D’UN JEUNE HOMME
L’on ne voit dans cette statue aucune marque particulière qui puisse faire juger quel est celui que l’on a voulu représenter : s’il est vrai, comme Cicéron le remarque, que les Grecs ne faisaient guère de statues que pour les divinités ou des hommes extraordinaires; on peut dire que celle-ci étant véritablement une statue grecque, elle doit avoir été faite pour représenter un de leurs dieux ou de leurs héros. Le sculpteur qui l’a faite a employé tout son art & toute sa science, pour représenter le corps d’un jeune homme bien fait.

VI. STATUE D’UN GLADIATEUR
Cette statue représente un gladiateur, mais apparemment un de ceux qui volontairement, ou pour une médiocre récompense, exposaient leurs vies, & combattaient à la vue du peuple romain, qui prenait son divertissement dans la cruauté de ces horribles spectacles. Cette figure vient du cardinal Mazarin. Ceux qui l’envoyèrent d’Italie prétendaient que c’était une statue d’Alexandre le Grand, qui tient d’une main une épée, & de l’autre un sceptre, disant que la médaille qui sert d’agrafe au vêtement qu’il a sur son épaule, représente la tête d’Aristote. Comme il n’y a aucune autre marque particulière par laquelle ce prince soit bien désigné, & qu’il n’y a dans le visage aucun trait qui ressemble aux autres statues & aux médailles grecques semblables, on ne la considère que comme la figure d’un gladiateur.

VII. STATUE DE MERCURE
Mercure, fils de Jupiter et de Maïa, fut tenu par les Anciens pour l’ambassadeur & le messager des Dieux. C’est pourquoi ils l’ont toujours représenté avec des ailes à son chapeau, & un caducée à la main. Et parce qu’ils le regardaient aussi comme la Divinité qui présidait sur tout ce qui concerne le trafic & la marchandise, on lui mettait une bourse à la main, comme dans cette statue que l’on voit conforme à ce qu’en ont écrit les poètes & les historiens, qui disent même que les grecs le représentaient avec le front grand, tel que l’avait Alcibiades, à la ressemblance duquel ils ont à plusieurs reprises, formé le visage de cette divinité.

VIII. STATUE D’AGRIPPINE
L’opinion commune est que cette statue représente Agrippine sortant du bain. Il n’y a point de marques particulières qui fassent connaître si c’est Agrippine, femme de Germanicus, ou sa fille surnommée Julie, Mère de Néron. Ce qu’il y a de considérable dans cette statue, c’est le soin que l’ouvrier a apporté à bien représenter le nu au travers d’un vêtement dont elle est couverte : car il semble que ce soit un linge qui l’enveloppe, & qui tout mouillé, soit comme collé sur son corps, ainsi qu’il arrive à ceux qui sortent de l’eau. Il y en a qui ont crû que cette statue était de l’Impératrice Julia Mammea, Mère de l’Empereur Sévère Alexandre. Il est difficile de dire au vrai quelle est la plus certaine de ces opinions. Cette figure vient du cabinet du cardinal Mazarin.

IX. STATUE DE CERÉS
Cérès ayant été considérée par les Anciens comme la Déesse des grains, & celle qui a enseigné aux hommes l’art de cultiver la terre, les sculpteurs l’ont toujours représentée tenant des épis de blés, ainsi que l’on voit dans cette statue, qui représente une femme vêtue d’habits majestueux parce que quelques auteurs ont cru que Cérès fut une Reine de Sicile, qui avait une fille qui fut enlevée par Orcus, Roi des Morussiens; ce qui a donné sujet à la fable du ravissement de Proserpine par Pluton.

X. STATUE DE LA MUSE THALIE
Cette figure représente la Muse Thalie. Le sculpteur lui a mis un masque à la main, car elle préside à la Comédie. On lui a attribué l’invention de la Géométrie, & de l’Agriculture. Plutarque la nomme la Déesse des banquets & dit qu’elle rend les hommes sociables & d’une agréable compagnie. L’on peut juger de la beauté de cette statue par le soin que l’ouvrier a pris de représenter le corps d’une belle femme, dont les vêtements sont si légers, & travaillés avec tant d’art & de délicatesse, qu’encore que son corps soit tout couvert, on ne laisse pas d’apercevoir le nu au travers des vêtements; ce qui donne à cette figure beaucoup de grâce & de majesté.

XI. STATUE DE FLORE
La guirlande et les fleurs que cette figure tient, font bien juger que c’est la Déesse Flore qu’on a voulu représenter. L’on sait assez que Flore a été une célèbre courtisane, qui laissa son bien au peuple romain, & qui destina quelque somme de deniers pour la célébration de certains jeux, qu’on appelaient floraux; en reconnaissance de quoi les romains firent de cette courtisane une divinité à laquelle ils attribuèrent le pouvoir de faire fleurir les plantes. Pour cacher à la postérité ce qu’elle avait été pendant sa vie, ils feignirent après sa mort qu’elle était femme de Zéphir, le plus doux et le plus agréable des vents. Ils lui bâtirent un temple sur le Mont Quirinal, & lui dressèrent plusieurs statues. On en voit une à Rome dans le Palais Farnese, qui est couronnée de fleurs. Elle est de marbre blanc, & beaucoup plus chargée de vêtements que celle-ci dont l’habit est d’un marbre grisâtre.

XII. STATUE D’UNE FEMME
Quelques-uns ont crû que cette figure représente la déesse Cérès, & que ce sont des pavots qu’elle tient d’une main. Il est assez difficile d’en bien juger parce qu’étant gâtés par le temps, on ne les peut bien distinguer. Cette figure est très belle, & très antique. Il paraît qu’elle est de la main d’un des plus excellents ouvriers qui travaillaient à Rome, où vraisemblablement elle a été faite; ce qui se reconnaît à ses vêtements, dont les grecs n’avaient pas coutume de vêtir leurs figures.

XIII. STATUE DE PORCIE
Quoique cette figure n’ait pas plus de deux pieds de haut, elle ne laisse pas d’être d’une grande beauté. Aussi les anciens prenaient un soin particulier à faire de ces petites statues parce qu’elles servaient d’ordinaire à orner & à embellir les cabinets & les lieux les plus considérables des palais. Ce vase plein de feu, d’où l’on voit que cette femme prend des charbons, fait bien connaître que c’est la figure de Porcie, fille de Caton & femme de Brutus, qui pour ne pas survivre à son mari, se fit mourir elle-même en s’étouffant avec des chardons ardents qu’elle mit dans sa bouche, ne pouvant se servir d’autres moyens parce que ses parents veillaient continuellement sur elle.

XIV. STATUE D’UN FAUNE
Les anciens romains mirent Faune, roi d’Italie, au nombre de leurs Dieux, à cause qu’il avait inventé beaucoup de choses touchant le labourage; & dans les images qu’ils en firent, ils le représentèrent avec des cornes à sur la tête, & des pieds de chèvre. Ils le firent père des faunes, des satyres, des pans, & des sylvains qu’ils estimaient des demi-dieux habitant les forêts, les bois, & les montagnes. Les laboureurs, les bergers & les autres habitants de la campagne adoraient ces divinités, & les considéraient comme leurs protecteurs. Or bien qu’on les représentât ordinairement avec des cuisses & des jambes de chèvre, on voit néanmoins des statues où ils n’ont rien de différent des autres hommes, sinon qu’ils ont des oreilles longues & pointues, & une queue semblable à celle des autres satyres. Ce que l’on peut observer de particulier dans cette statue, c’est que les proportions du corps sont différentes de celles des autres divinités, & . Elles tiennent plus de celles des hommes rustiques & champêtres, que de celles des héros. En effet, les faunes sont les Dieux de la campagne, & de ceux que le Guarmi appelle «  della plebe de gli Dei  »

XV. AUTRE STATUE D’UN FAUNE
Cette statue représente un faune semblable au précédent. Il est comme appuyé sur une outre, & tient dans ses mains de ces sortes d’instruments dont jouaient ordinairement les bacchantes, & ceux qui suivaient Bacchus. Cette figure paraît de la même main que l’autre faune qui tient un chalumeau, & sont toutes deux d’un excellent travail. Elles viennent du cardinal Mazarin.

XVI. BUSTE D’UN SÉNATEUR ROMAIN
Cette tête avec son buste représente un sénateur romain enveloppé d’un grand manteau jeté sur l’épaule gauche, & qu’il tient de la main droite. Tous les traits du visage sont marqués avec beaucoup d’art & de science, & l’on voit quelque chose dans les yeux de fier & de hardi.

XVII. BUSTE D’UNE DAME ROMAINE
Le sculpteur a représenté ici une dame romaine couverte de ce grand habit qu’ils nommaient stola & coiffée d’une manière négligée. Cette tête est fort belle & bien conservée.

XVIII. AUTRE BUSTE D’UNE ROMAINE
La coiffure particulière de cette figure fait juger que c’est une personne de grande considération que l’on a représentée, parce que toutes les dames romaines ne portaient pas indifféremment un ornement aussi riche, & semblable dont cette tête est parée. Les vêtements qui la couvrent, & qui forment le buste, sont d’un marbre jaspé, & la tête de marbre antique. Elle vient du cardinal Mazarin.

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